Lettre de saint Paul Apôtre aux Éphésiens 6,10-17.
Frères, fortifiez-vous dans le Seigneur, dans la force de sa puissance.
Revêtez-vous de l'armure de Dieu, afin de pouvoir résister aux embûches du diable.
Car nous n'avons pas à lutter contre la chair et le sang, mais contre les princes, contre les puissances, contre les dominateurs de ce monde de ténèbres, contre les esprits mauvais répandus dans l'air.
C'est pourquoi prenez l'armure de Dieu, afin de pouvoir résister au jour mauvais, et après avoir tout surmonté, rester debout.
Soyez donc fermes, les reins ceints de la vérité, revêtus de la cuirasse de justice,
et les sandales aux pieds, prêts à annoncer l'Evangile de paix.
Et surtout, prenez le bouclier de la foi, par lequel vous pourrez éteindre tous les traits enflammés du Malin.
Prenez aussi le casque du salut, et le glaive de l'Esprit, qui est la parole de Dieu.
Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 18,23-35.
En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples cette parabole : "Le royaume des cieux est comparable à un roi qui voulut régler ses comptes avec ses serviteurs.
Quand il se mit à régler les comptes, on lui amena un débiteur de dix mille talents.
Comme il n'avait pas de quoi payer, son maître ordonna qu'on le vendît, lui, sa femme, ses enfants et tout ce qu'il avait pour que paiement fût fait.
Alors le serviteur, tombé à ses pieds, demeurait prosterné, disant : " Seigneur, aie patience envers moi, et je te paierai tout. "
Touché de compassion, le maître de ce serviteur le laissa aller et lui remit sa dette.
Ce serviteur, à peine sorti, rencontra un de ses compagnons de service, qui lui devait cent deniers. L'ayant saisi à la gorge, il l'étouffait, disant : " Paie ce que tu dois. "
Son compagnon de service, tombé à ses pieds, le suppliait, disant : " Aie patience envers moi, et je te paierai. "
Mai lui ne voulait pas, et il s'en alla le faire mettre en prison jusqu'à ce qu'il eût payé sa dette.
Ce que voyant, ses compagnons de service furent grandement contristés, et ils vinrent raconter à leur maître ce qui s'était passé.
Alors le maître le fit appeler et lui dit : " Serviteur méchant, je t'ai remis toute cette dette, parce que tu m'as supplié.
Ne devais-tu pas, toi aussi, avoir pitié de ton compagnon de service, comme moi-même j'ai eu pitié de toi ? "
Et son maître irrité le livra aux bourreaux, jusqu'à ce qu'il eût payé toute sa dette.
Ainsi vous traitera mon Père céleste, si chacun de vous ne pardonne à son frère du fond du cœur. "
Par Saint François de Sales
(1567-1622), évêque de Genève et docteur de l'Église
Sermon pour le Vendredi saint, 25/03/1622 (français modernisé)
Pardonner à notre frère de tout notre cœur
La première parole que notre Seigneur prononça sur la croix fut une prière pour ceux qui le crucifiaient ; et c'est alors qu'il fit ce qu'écrit Saint Paul :
« Aux jours où il vivait dans la chair, il offrit prières et sacrifices » (He 5,7).
Certes, ceux qui crucifiaient notre divin Sauveur ne le connaissaient pas..., car s'ils l'avaient connu ils ne l'auraient pas crucifié (1Co 2,8).
Notre Seigneur donc, voyant l'ignorance et la faiblesse de ceux qui le tourmentaient, commença à les excuser et à offrir pour eux ce sacrifice à son Père céleste, car la prière est un sacrifice... :
« Mon Père, pardonne-leur parce qu'ils ne savent ce qu'ils font » (Lc 23,34).
Combien grande était la flamme d'amour qui brûlait dans le cœur de notre doux Sauveur, puisqu'au plus fort de ses douleurs, au temps où la véhémence de ses tourments semblait lui ôter même le pouvoir de prier pour lui-même, il vint par la force de sa charité à s'oublier soi-même, mais non ceux qu'il avait créés...
Il voulait par là nous faire comprendre l'amour qu'il nous portait, lequel ne pouvait être diminué par aucune sorte de souffrance, et nous apprendre aussi quel doit être notre cœur à l'endroit de notre prochain...
Or, ce divin Seigneur s'étant employé à demander pardon pour les hommes, il est tout certain que sa demande lui fut accordée, car son divin Père l'honorait trop pour lui refuser quelque chose de ce qu'il lui demandait.
Saint Hilarion, qui êtes-vous ?
Hilarion naquit en Palestine, en 293, dans le village de Thabatha, non loin de Gaza.
Ses parents païens l'envoyèrent apprendre les lettres humaines à Alexandrie. Ce fut l'occasion pour lui d'entrer en contact avec les Chrétiens et de découvrir la doctrine sublime de l'Evangile, qui a rendue folle la sagesse du monde.
Ayant entendu parler de Saint Antoine, dont la renommée brillait dans toute l'Egypte, Hilarion se mit en route pour le désert, afin de lui rendre visite. A la vue de la vie angélique que menait Antoine, il décida de rester à ses côtés, avec les autres disciples du Père des moines.
Mais comme les foules qui accouraient vers le désert pour recevoir la bénédiction du Saint empêchaient Antoine de vaquer à la prière silencieuse, il décida de partir vers les âpres solitudes du désert intérieur.
Après avoir donné à Hilarion sa tunique de crin et son manteau de peau, il envoya le jeune garçon, qui n'avait alors que quinze ans, pratiquer l'ascèse avec quelques compagnons dans le désert situé près de Meiouma, dans la région de Gaza.
Hilarion partit audacieusement engager la lutte contre les démons habitant cette effroyable solitude, où nul ne demeurait et qui n'était traversée de temps à autre que par des bandes de brigands.
Il entreprit là de réduire son corps en servitude et d'éteindre les ardeurs de la jeunesse par un jeûne sévère: Il ne se nourrissait que de quinze figues par jour, après le coucher du soleil.
Pendant la journée, il priait et chantait sans cesse les Psaumes en labourant le sol aride, afin que la fatigue du travail s'ajoute à celle du jeûne, sans produire quoique ce soit qui puisse être vendu et entraîner la tentation de l'avarice.
Le démon ainsi attaqué dans sa propre demeure par un enfant, passa à l'assaut, comme il l'avait fait pour Saint Antoine.
Il lui apparut sous forme de bêtes sauvages, tenta de lui faire peur par des bruits terrifiants et inexplicables.
Mais tout cela s'avérait inutile, car le jeune homme repoussait ses assauts par le signe de la Croix et prenait lui-même l'initiative du combat en raillant l'impuissance du Malin.
De l'âge de seize ans jusqu'à l'âge de vingt ans, il n'eut d'autre abri qu'une cabane de joncs et d'herbes marécageuses. Il se construisit ensuite une cellule si basse qu'elle ressemblait davantage à un sépulcre qu'à une maison.
Il couchait sur la terre dure, ne se lavait et ne se coupait les cheveux qu'une fois par an, le jour de Pâques. Il ne lava jamais le sac de peau que lui avait donné Saint Antoine, et ne changeait sa tunique que lorsqu'elle tombait en pièces.
Il savait toute l'Ecriture Sainte par coeur et la récitait tout haut en se tenant avec crainte, comme si Dieu était présent devant ses yeux.
De l'âge de vingt-et-un ans à celui de vingt-sept ans, il ne mangea chaque jour qu'un peu de lentilles trempées dans de l'eau froide pendant trois ans, et les trois autres années se contenta de pain avec du sel et de l'eau.
De 27 à 30 ans, il ne vécut que d'herbes sauvages; de 30 à 35 ans de pain d'orge et d'un peu d'herbes cuites sans huile.
Mais atteint alors d'une maladie et sa vue ayant baissée, il rajouta un peu d'huile à son menu et continua ainsi jusqu'à l'âge de 63 ans.
Voyant son corps s'affaiblir et croyant que sa mort était proche, il ne mangea plus de pain jusqu'à la fin de ses jours, redoublant ainsi de ferveur, comme un jeune novice, à l'âge où d'autres ont coutume de diminuer leurs austérités.
Il continua ainsi sa manière de vivre jusqu'à la mort, ne mangeant jamais qu'après que le soleil soit couché et ne rompant jamais son jeûne, ni aux jours de fêtes, ni dans ses plus grandes maladies.
Ces travaux surhumains qu'entreprit Saint Hilarion par amour de Dieu ouvrirent non seulement son coeur à recevoir la contemplation des Mystères célestes, mais la grâce recouvrit aussi son corps et lui donna le pouvoir d'accomplir des miracles pour la consolation des fidèles.
Il guérit des malades et délivra un grand nombre de possédés par des esprits impurs.
Alors qu'il n'était encore âgé que de 22 ans, sa réputation s'était déjà répandue dans toute la Palestine et même jusqu'en Egypte et en Syrie.
On accourait vers lui en foule, et nombreux étaient ceux qui lui demandaient d'embrasser la vie angélique à ses côtés; car jusqu'alors la vie monastique n'était pas encore apparue en Palestine et en Syrie.
C'est ainsi «Hilarion devint pour ces régions ce que Saint Antoine était pour l'Egypte. Il restait en relation épistolaire avec le grand Antoine.
Lorsqu'on amenait à ce dernier des malades venus de ces régions, il leur disait:
«Pourquoi vous donner la peine de venir de si loin, puisque vous avez là-bas mon fils Hilarion?»
Ceux qui embrassèrent la vie solitaire et s'installèrent dans des cellules autour de Saint Hilarion atteignirent bientôt le nombre de deux mille.
Tous le reconnaissaient comme leur Père et leur guide.
Une fois l'an, à l'époque des vendanges, Hilarion partait visiter tous les monastères. Il leur apportait alors leur subsistance pour l'année et prenait l'occasion de rassembler la foule de ses disciples.
Parvenu à l'âge de 63 ans, la multitude des frères rangés sous sa direction et les foules de malades et de fidèles, qui accouraient sans cesse de toutes parts vers sa retraite, ne lui laissaient plus un instant de répit pour vaquer à la contemplation dans le silence.
Aussi, c'est avec des larmes abondantes qu'il se souvenait de ses premières années passées dans l'ascèse, inconnu de tous.
A force de larmes, il parvint à faire accepter son départ à ses disciples. Mais le jour venu, plus de dix mille personnes voulurent le suivre partout où il se rendrait, afin de ne pas perdre la grâce qui était attachée à sa personne.
Il parvint à les persuader de s'en retourner et ne prit avec lui que quarante disciples capables de supporter de longs voyages à pieds en jeûnant tout le jour.
Comme il avait appris la mort de Saint Antoine, Hilarion se dirigea vers l'Egypte, pour vénérer les lieux qui avaient été sanctifiés par le séjour du Saint.
C'est avec abondantes larmes qu'il visita et se prosterna devant tous les lieux et les objets qu'avait touchés Antoine.
Au sortir du désert de Saint Antoine, Hilarion partit en quête de solitude. Mais où qu'il se rendit, du désert à Alexandrie, il répandait autour de lui la grâce, les miracles et les guérisons, si bien qu'on accourrait en foule et que sa renommée le devançait partout où il allait, sans jamais lui laisser de repos.
Pendant les trois années (360-363) de la tyrannie de Julien l'Apostat, le monastère de saint Hilarion près de Gaza fut détruit et ses moines dispersés, aussi le Saint décida-t-il de trouver refuge en Libye.
De là, il fit voile pour la Sicile, pensant trouver la solitude dans ces régions où il était inconnu.
Or, contraint par son amour des hommes, il chassa à nouveau les démons, guérit les malades et attira ainsi à lui les foules.
Il s'enfuit une nouvelle fois et se rendit dans un bourg de Dalmatie, région encore habitée par les barbares. Mais là encore, il mit à mort une bête monstrueuse qui effrayait les habitants, et les convertit au Christianisme.
Il prit la fuite de nuit pour échapper aux honneurs et s'embarqua sur un vaisseau marchand pour l'île de Chypre. A peine arrivé sur l'île, les possédés se mirent à crier en annonçant avec panique qu'Hilarion, le serviteur de Jésus-Christ, était venu dans l'île pour les en chasser.
Il lui fallut donc trouver une nouvelle retraite.
C'est pourquoi il se rendit dans un endroit inhabité de l'île et s'installa dans une grotte inaccessible, située au sommet d'une montagne escarpée.
Il demeura là cinq ans, visité seulement de temps à autre par son fidèle disciple Hésychius, qui venait lui donner des nouvelles de Palestine. Parvenu à l'âge de quatre-vingt ans, le corps extrêmement affaibli par ses austérités soutenues, Hilarion fit les préparatifs pour son départ et réunit autour de lui les quelques fidèles qui avaient pu atteindre sa demeure.
Alors qu'il était étendu, presque mort de corps, il gardait les yeux ouverts en disant:
«Sors mon âme, que crains-tu? Sors, de quoi as-tu peur.?
Tu as servi Jésus-Christ près de soixante-dix ans et tu crains la mort?» En achevant ces paroles, il rendit son âme à Dieu et fut immédiatement enterré par ses disciples, conformément à ses instructions, afin de ne pas recevoir les honneurs de la sépulture des Saints.
Quelque temps plus tard, Hésychius vint prendre le corps du Saint et le transporta en Palestine, pour qu'il soit vénéré par la multitude de ses disciples.
Par Saint Fulgence de Ruspe
(467-532), évêque en Afrique du Nord
Sermon I, 2-3 ; CCL 91 A, 889 (trad. Orval)
« Serviteurs du Christ et intendants des mystères de Dieu » (1Co 4,1)
Pour préciser le rôle des serviteurs qu'il a placés à la tête de son peuple, le Seigneur dit cette parole que rapporte l'Évangile : « Quel est l'intendant sage et fidèle que le maître établira sur les gens de sa maison pour leur donner en temps voulu leur mesure de blé ?
Heureux ce serviteur que le maître, à son retour, trouvera occupé de la sorte »...
Si nous nous demandons quelle est cette mesure de blé, saint Paul nous l'indique ; c'est
« la mesure de foi que Dieu vous a départie » (Rm 12,3).
Ce que le Christ appelle mesure de blé, Paul le nomme mesure de foi pour nous apprendre qu'il n'y a pas d'autre blé spirituel que le mystère de la foi chrétienne.
Cette mesure de blé, nous vous la donnons au nom du Seigneur chaque fois que, éclairés par le don spirituel de la grâce, nous vous parlons selon la règle de la vraie foi.
Cette mesure, vous la recevez par les intendants du Seigneur chaque jour où vous entendez de la bouche des serviteurs de Dieu la parole de vérité.
Qu'elle soit notre nourriture, cette mesure de blé que Dieu nous donne en partage.
Tirons-en l'aliment de notre bonne conduite afin de parvenir à la récompense de la vie éternelle.
Croyons en celui qui se donne lui-même à nous comme nourriture pour que nous ne défaillions pas en chemin (Mt 15,32), et qui se réserve comme notre récompense pour que nous trouvions la joie dans la patrie.
Croyons et espérons en lui ; aimons-le par-dessus tout et en tout
Car le Christ est notre aliment et il sera notre récompense.
Le Christ est la nourriture et le réconfort des voyageurs en marche ; il est l'assouvissement et l'exultation des bienheureux en leur repos.