1. La gloire d’un homme de bien est témoignage que lui rend sa conscience. (II Cor. I, 12.) Ayez cette bonne conscience, et vous aurez une joie continuelle. La bonne conscience peut supporter beaucoup de choses, et goûter une grande joie au milieu des adversités. La mauvaise conscience est toujours timide et inquiète. Vous jouirez d’un agréable repos, si votre intérieur ne vous reproche rien. Ne vous réjouissez jamais sauf quand vous aurez bien fait.

 

Les méchants n’ont jamais de joie véritable, et ne sentent point la paix intérieure, parce qu’il n’y a point de paix, pour les impies, dit le Seigneur. (Is. lvii 21.) Quand ils diraient : Nous somme, en paix, les maux ne viendront point sur nous : qui est-ce qui osera nous nuire ? Ne les croyez pas ; car la colère de Dieu s’élèvera tout d’un coup, et leurs actions seront anéanties, et leurs pensées se dissiperont.

  1. Il n’est pas difficile à celui qui aime de se glorifier dans la tribulation, parce que se glorifier de la sorte, c’est se glorifier dans la croix du Seigneur. (Rom. v, 3. Gai. vi, 4.)

 

La gloire que les hommes se donnent réciproquement passe vite ; elle est toujours accompagnée de tristesse. La gloire des bons est dans leur conscience même et non dans la bouche des hommes. La joie des justes est de Dieu et en Dieu leur joie est dans la vérité.

 

Celui qui aspire à la gloire véritable et éternelle ne se soucie pas de la gloire temporelle ; et celui qui cherche la gloire du siècle, ou qui ne la méprise pas sincèrement, fait bien voir qu’il n’aime pas assez l’éternelle. Celui qui est indifférent aux louanges ou au blâme jouit d’une grande tranquillité d’esprit.

  1. L’homme qui a la conscience pure sera aisément content et paisible. La louange des hommes ne vous rend pas plus saint, et leur blâme ne vous rend pas moins estimable. Vous êtes ce que vous êtes; et ce que les hommes peuvent dire de vous ne vous rendra pas aux yeux de Dieu plus grand que vous ne l’êtes.

 

Si vous considérez ce que vous êtes au dedans de vous, vous ne vous mettrez pas en peine de ce que l’on dira de vous.

 

L’homme ne voit que le dehors ; mais Dieu voit jusqu’au cœur. (I Reg. xvi, 7.) L’homme regarde les œuvres ; mais Dieu considère l’intention. Faire toujours bien et s’estimer peu, c’est la marque d’une âme humble. Ne vouloir recevoir de consolation d’aucune créature, c’est le signe d’une grande pureté et d’une confiance intérieure en Dieu.

  1. Celui-là fait bien voir qu’il s’est entièrement abandonné à Dieu, qui ne cherche au dehors aucun témoignage en sa faveur. Car, comme dit saint Paul : Ce n’est pas celui qui se rend témoignage à soi-même qui mérite d’être estimé, mais celui à qui Dieu rend témoignage. (II Cor. x, 18.) Marcher avec Dieu au dedans, et n’être lié d’aucune affection au dehors, c’est la disposition d’un homme intérieur.

 

PRATIQUE

 

La paix d’une bonne conscience n’exclut pas toujours les troubles que les tentations et les peines intérieures forment dans l’esprit ; mais elle fait que parmi tous les orages qui s’y élèvent, le cœur est soumis et fidèle à Dieu : soumis à souffrir la peine, et fidèle à ne pas succomber, mais à résister, à combattre, et à ne rien négliger par découragement. C’est ainsi qu’une âme peinée et soumise est, dit le Prophète — Roi —, un sacrifice agréable à Dieu, qui ne rebute jamais un cœur contrit et humilié : humilié de se voir assujetti au sentiment de ses misères, et contrit du sujet qu’il a donné à Dieu de les lui faire sentir. Prenons là-dessus une résolution ferme et constante de ne nous laisser abattre ni par nos chutes, ni par nos peines, ni par le sentiment et l’expérience de nos misères, mais de nous humilier devant Dieu de nous voir si misérables, et lui demander pardon des fautes que nous avons faites en ne résistant pas comme nous le devons aux attaques de l’ennemi de notre salut ; de nous en punir sur l’heure, en nous privant de quelque satisfaction ; et après cela demeurons en repos, car la bonne conscience est celle qui est exempte de péché par la fidélité, ou qui en est épurée par la pénitence.

 

PRIÈRE

 

Vous savez, Seigneur, à combien de tentations, de peines intérieures et de périls du salut nous sommes exposés, et par le penchant naturel et violent que nous avons pour le mal, et par la répugnance continuelle que nous avons au bien, et par les assauts des tentations. Comment pourrions-nous résister à tant d’ennemis si puissants et si animés à notre perte, si vous n’aviez la bonté de nous secourir ?

 

C’est donc à vous que nous élevons nos cœurs, nos esprits et nos yeux, pour vous supplier de ne nous pas laisser périr, et de ne pas permettre que nous succombions à la tentation, mais de nous délivrer du plus grand et du seul mal à craindre, qui est le péché. Ainsi soit-il.

 

Extrait de : IMITATION DE JÉSUS-CHRIST

CHAPITRE VI Édition 1899